LE TRUC DE CHARLES PASQUA

LE TRUC DE CHARLES PASQUA

Je ne vous parlerai pas des performances politiques de notre ancien ministre de l’Intérieur (paix à ses cendres !) ni de ses combinazioni tortueuses.

— Alors, de quoi voulez-vous parler ?

— D’un de ses « trucs » d’orateur. C’est à propos de l’épineux problème : Comment aborder un public hostile ?

— Problème épineux, on peut le dire !

— Un jour, alors que j’étais encore enseignant à la « Fac Pasqua » (autrement dit au Pôle universitaire Léonard de Vinci), j’assiste à une sorte de colloque qui doit durer toute une journée et auquel sont conviés tous les cadres, professeurs et chefs de quelque chose de l’établissement. La séance commence à 9 h du matin et elle doit être présidée par le grand patron en personne.

9 h et demi : personne ! Le public montre des signes d’impatience. 10 h : toujours pas de Pasqua ! L’agacement monte, presque la rébellion. Vers 10 h et quart, il arrive, souriant, et monte à la tribune devant 200 personnes prêtes à le siffler. Et le voilà qui se met à nous raconter, avec son inimitable accent corse, une histoire du genre : « Mesdames et Messieurs, je suis navré de vous avoir fait attendre… Figurez-vous que mon chauffeur a voulu prendre un raccourci et qu’il est passé par le marché de la place des Sablons et il y avait un tel embouteillage que nous sommes restés coincés, et une brave dame (il disait : « u-neu bra-veu da-meu ») s’approche de ma voiture et elle me reconnaît par le carreau et elle me dit : « Ah, Monsieur Charles ! Je suis si contente de vous voir… Dites-moi : quand est-ce que tous ces travaux vont donc être terminés ? etc. »

Très habile, le Charles ! Avec sa petite histoire, il nous signale au passage qu’il est proche du peuple (il aime passer par le marché), qu’il est populaire dans sa circonscription (une vieille dame le reconnaît dans sa voiture et l’appelle par son prénom) et qu’il est très occupé par des problèmes importants de sa ville (la durée des travaux).

Quand nous entendons cette histoire, la nervosité se calme et à la fin, il sort sous les applaudissements (bien sûr, il avait des choses si importantes à faire qu’il ne pouvait pas rester toute la matinée à présider notre colloque).

— Faut-il donc séduire le public hostile en lui racontant des anecdotes de ce calibre ?

— Oui, absolument ! C’est une vieille recette que les évangélistes américains utilisent sans vergogne. Mais attention ! Il faut changer d’anecdote à chaque séance, sinon… Personnellement, j’étais sous le charme, mais voilà qu’un beau jour, quelques années plus tard, lors d’une autre séance sur un tout autre sujet, voilà notre Charles qui raconte la même histoire. Le charme était rompu.

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